EPHEMERIDE


Anne sexton tu vis ou tu meurs

 

JEUNE

Il y a mille portes de cela
alors que j’étais une gamine solitaire
vivant dans une grande maison
avec quatre garages et que c’était l’été,
aussi loin que je me souvienne, 
une nuit j’étais couchée dans l’herbe,
les trèfles se ridaient sous mon corps,
les étoiles sages s’incrustaient au-dessus de moi, 
la fenêtre de ma mère était un entonnoir
de chaleur jaune s’épuisant, 
la fenêtre de mon père, mi-close,
un œil où passent des dormeurs, 
et les planches de la maison
étaient aussi lisses et blanches que de la cire
et un million de feuilles peut-être
naviguaient sur leurs tiges étranges
pendant que les grillons stridulaient en chœur
et moi, dans mon corps tout neuf, 
qui n’était pas encore celui d’une femme, 
je livrais mes problèmes aux étoiles
et croyais que Dieu pouvait vraiment voir
la chaleur et la lueur colorée, 
des coudes, des genoux, des rêves, bonne nuit. 
(p. 140)

(NDLR, A thousand doors ago

when I was a lonely kid : version originale et analyse, en anglais, de ce poème)

 

&



VIEILLE

J’ai peur des aiguilles.
Je suis lasse des draps et des tuyaux en caoutchouc. 
Je suis lasse des visages que je ne connais pas
et maintenant je pense que la mort s’est enclenchée.
La mort s’enclenche comme un rêve, 
rempli d’objets et du rire de ma sœur.
Nous sommes jeunes et nous nous promenons
en cueillant des bleuets
jusqu’à Damariscotta. 
Oh ! Susan, s’est-elle exclamée
tu as taché ton nouveau bustier. 
Goût sucré
– ma bouche si pleine
et le jus bleu et mielleux coulant
jusqu’à Damariscotta. 
Qu’est-ce que tu fais ? Laisse-moi tranquille !
Ne vois-tu pas que je suis en train de rêver ? 
Dans les rêves, on n’a jamais quatre-vingt ans.
(p. 167

(NDLR, I'm afraid of needles.
I'm tired of rubber sheets and tubes
 :  version originalede ce poème)

Anne Sexton, Tu vis ou tu meurs, œuvres poétique (1960-1969)d’Anne Sexton, traduction de l’anglais (Etast-Unis) de Sabine Huynh, préface de Patricia Godi, Editions des Femmes Antoine fouque, 2022, 320 p., 24 €

sources: Poezibao

Commentaires

06.04 | 06:20

Emerger de notre vivier , aprés y avoir puiser toutes les émotions .
Ecrire , crypter ce vécu , cette traversée .....

10.10 | 11:28

Aimer ne se négocie pas - oh que non. L'amitié non plus. Amour Amitié ces deux piliers de la vie - Merci Annie de si bellement nous le rappeler.

25.01 | 06:56

MAGISTRAL, DEVOS

06.08 | 13:40

Bonjour Anne Marie,

Quel plaisir d'écouter Pascal Quignard, que je n'ai jamais réussi à lire, je vais essayer à nouveau avec "l'Homme au trois lettres".

marc