Dans « Les Déserts de l'amour », Arthur Rimbaud fait le récit de ce rêve qui le ramène dans le cadre familier
de la maison maternelle...
« Avertissement : Ces écritures-ci sont d'un jeune, tout jeune homme, dont la vie s'est développée n'importe où ; sans
mère, sans pays, insoucieux de tout ce qu'on connaît, fuyant toute force morale, comme furent déjà plusieurs pitoyables jeunes hommes. [...]
C'est certes la même campagne. La même maison rustique de mes
parents : la salle même où les dessus de porte sont des bergeries roussies, avec des armes et des lions. Au dîner, il y a un salon, avec des bougies et des vins et des boiseries rustiques. La table à manger est très-grande.
Les servantes ! Elles étaient plusieurs, autant que je m'en suis souvenu. - Il y avait là un de mes jeunes amis anciens, prêtre et vêtu en prêtre, maintenant : c'était pour être plus libre. Je me souviens de sa
chambre de pourpre, à vitres de papier jaune : et ses livres, cachés, qui avaient trempé dans l'océan !
Moi j'étais abandonné, dans cette maison de campagne sans fin : lisant dans la cuisine, séchant
la boue de mes habits devant les hôtes, aux conversations du salon : ému jusqu'à la mort par le murmure du lait du matin et de la nuit du siècle dernier » (« Les
Déserts de l'amour », vers 1871).