SEQUENCES VIVES

Y A PAS PHOTO !

 

La photographie capte le temps présent comme un regard témoin de sa propre existence. 

J’écoutais Anny Dupérey présenter son récent livre de photos en noir et blanc, avec cette clarté de conscience qu’elle a de son art relié à son histoire depuis la mort accidentelle de ses parents, dans son enfance. Tout en l’écoutant, m’est revenu le souvenir d’une photo que je ne possède pas, que je n’ai jamais vue.

J’étais à Paris avec cet amour à jamais de ces années là. Nous étions dans un musée, quand un cliché a flouté le décor. Lui et moi étions assis par terre, regardant des tableaux, très près l’un de l’autre, dans un moment de grâce. J’étais heureuse. L’art et l’amour  sublimaient l’instant quand un flash rapide et inattendu nous illumina. Je me suis retournée et j’ai vu le photographe qui venait d’immortaliser pour lui notre couple à cet instant T. Il a disparu aussitôt. Je ne saurai jamais pourquoi il nous avait photographiés, ni comment fut la photo, mais j’imagine qu’elle fut belle parce que nous étions heureux.

Souvent, quand on regarde une photographie, on oublie les émotions qui animaient les personnes au moment du cliché mais mon expérience de cette photo vécue est inverse : je ne peux regarder ce souvenir mais je suis encore habitée par l’unité que je ressentis alors comme une éternité tout à coup partagée avec un inconnu qui passait par hasard. En écrivant cela, se développe en moi le négatif de la pellicule ; l’opaque se révèle à la lumière quand se réveille la conscience à l’œuvre. 

C’est après que les êtres chers s’en sont allés, que le précieux de leur être intime résonne mieux au creux de la mémoire, comme si les scories et les boues s’étaient déliées de leurs attaches, laissant libre un chant pur, simple et doux à l’oreille. 

Le réel est fulgurance, point sur un i, coup de cymbale, pas de danse, éclosion de sens, éclat du désir. Il fait force de loi. 

Y a pas photo !

 

 

Anny C.

REBUS ET ENTRELACS

SYLVAIN LELIEVRE

PARENTESE INATTENDUE

 

En roulant sur l’autoroute vers le Bassin d’Arcachon, je traverse, un dimanche matin de janvier, une image fuyante et saisissante, comme celle que l’on voit depuis un train à grande vitesse : ce qui  saisit mon regard, c’est un large rideau de pins serrés mais pas trop, juste assez éloignés pour qu’infuse la lumière entre les troncs, je ne vois pas la cime des arbres par la fenêtre gauche de ma voiture, si bien que seule cette lumière tissée me rappelle fugacement une forêt vibrante de Gustave Klimt. Cette vision dure le temps transversal où de fines gouttelettes de pluie se mettent à envahir mon pare-brise, donnant à l’ensemble encore plus l’impression d’un Klimt.

Le ciel face à moi, devient sombre, d’un gris noir lumineux qui trace dans le ciel une portée musicale sur laquelle des notes dansent le concerto n°1 de Brahms et je roule l'âme enchantée, alors qu’elle s’évanouit et que l’image s’efface.

Anny C.

in

De fil en aiguille

inédit

 

 

 

 



DE FIL EN AIGUILLE

DE FIL EN AIGUILLE

Une année cousue au fil rouge.

 

                        Au temps, le grand révélateur.

 

« Cet étrange bonheur que personne ne sache où vous êtes : il n’y a plus qu’un ange pour vous trouver. »

 

Christian Bobin

LA NUIT DU CŒUR

 

 

J'ouvre  LA NUIT DU CŒUR  pour finir l’année en beauté.

Les livres permettent, comme la musique, un partage de désirs.

Christian Bobin, à Conques, devient pour la lectrice que je suis, le temps d’un jour et de deux nuits «l’ami, l’hôte de hôtes, Zarathoustra. »

selon Nietzsche.  

 

Je viens de quitter un amical lever de soleil méditerranéen du côté de Sète, devenu époustouflant au-dessus de Vallauris, d’embrasser Chagall à Aix en Provence, de vivre Noël parmi les jouets dans les crèches de mon cœur sur La Côte d’Azur puis à Castres au pied de la montagne noire, mystérieuse comme un vitrail de Soulages, dans l’abbatiale près de laquelle je me pose, colombe à la Picasso, dans un hôtel au charme ancestral, sûre d’avoir trouvé un nid brodé d’ardoises moussues à fleurir de mots.

 

« Parfois, d’un rien, une fête surgit » écrit Bobin.

 

L’amour, quand il prend un visage, réjouit le cœur. Et c’est, dès mon arrivée dans la nuit, comme au lever du jour, le visage de l’abbatiale qui s’offre à ma vue. Je ne sais quelle harmonie entre la pierre blonde et ses gris feutrés chante, suspendue au ciel et ancrée dans les pavés médiévaux ; je ne sais quel miracle de la rencontre entre les lignes du Moyen-âge et celles des vitraux contemporains, tantôt horizontales comme celles d’une portée musicale, tantôt obliques comme des vagues océanes, murmure à la lumière une berceuse hors du temps apaisant tous mes tourments et qui s’appelle Beauté.

 

Je ne sais si j’aurais aussi bien entendu les sons du jour si je n’avais pas lu les pages de Bobin, certainement pas : ses mots ont aiguisé mon ouïe et, quand, devant le tympan de l’abbatiale silencieuse en cette matinée du 30 décembre 2018, passe un ange noir branché qui écoute une musique rock insolite, je ne sais si je suis d’ici ou d’ailleurs, d’hier ou d’aujourd’hui. Alors, entrant dans la froide cathédrale de pierres, curieuse sous le regard malicieux des curieux de Conques, je suis happée par la lumière douce qui nappe et réchauffe l’esprit du lieu. Une neutralité bienveillante descend des vitraux de Soulages : l’artiste s’est humblement effacé pour que jouent les gris, les bleus ou les orangés du jour, pas la couleur rien que la nuance d’un sanglot long d’un violon verlainien qui berce le cœur du poète blessé.

Dans les ruelles aux ocres chaudes, sur les murs où s’adosse le temps, à travers les branches nues des arbres en hiver, plane, danse et rit une brume duveteuse assortie aux vitraux. Tant d’élégance discrète en un lieu, en un jour, triomphe de tous les opiums de l’époque.

 

Un chœur de voix intemporelles s’évade de l’abbatiale comme fleurs de Sainte Foy, offrande à ce dimanche qui met un point d’orgue à l’année écoulée. J’assiste à la messe du jour. A ma droite une famille de six enfants. Entre la maman et moi une distance infinie. Et pourtant le liant entre nous, ce sont les enfants qui chantent dans mon âme. Avant hier je dansais avec mes petits neveux, aujourd’hui je suis seule dans l’abbatiale.

Christian Bobin écrit « La solitude d’un homme, de tous les hommes, à quoi la comparer, comment la mesurer ? »

 

 Peut-être à la distance qu’il met avec son enfance ; je ne sais quelle est la distance de cette mère avec son enfance, elle si comblée d’enfants ! Pour moi, il n’y a aucune distance, je suis l’enfance mordorée sous le tympan de l’abbatiale de Conques. Sur le sol, à l’intérieur, près des grilles si bellement forgées, je l’ai vue jouer avec les lucioles de l’Esprit. Le feu à l’auberge où je loge danse à l’unisson.

Les napperons d’ardoises des toits que je vois de la fenêtre de ma chambre 15 rappellent les frises des cahiers d’école maternelle.

L’esprit de Conques se joue du temps qui passe et vous laisse l’aimer.

Mon bureau est collé à la fenêtre avec vue sur l’abbatiale, les nappes brodées des toits tombent amplement en attendant des réveillons d’oiseaux : un silence inouï pèse comme neige, c’est un lieu à n’en pas mourir.

 

Christian Bobin écrit qu’il sculpte ses phrases, tâche d’écrire Conques comme un tailleur de pierres et moi, le lisant, je quête la fulgurance d’un nuage singulier qui brode son texte !

 

Et je le trouve ce nuage singulier, comme par enchantement : « Les jours passent, s’écrivent, s’effacent. Je n’attends rien, ou bien alors comme l’enfant derrière la vitre attend la neige. »

 

Ce 31 décembre, je quitte Conques dont on dit, écrit Christian Bobin, « qu’on n’y vient qu’une fois… »

 

J’ai le sentiment d’y être passée comme est passée l’année, dans une vapeur songeuse, et d’y avoir dormi dans un lit de pierres-lumières.

Il est des lieux qui sont plus que des lieux, ce sont des livres d’heures ouverts comme Conques, comme Vézelay.

 

En partant, l’aubergiste très affairé malgré son âge avancé, me dit, parce que je l’en félicitai, que son grand-père lui avait conseillé de ne pas être « en désoeuvrance » pour ne pas se perdre. Ce mot est magnifique, plus noble que sa cousine oisiveté.

 

« Oui, l’œuvre sort plus belle,

D’une forme au travail

Rebelle »

 écrivait Théophile Gautier tout comme le disait Chagall qui travailla jusqu’au dernier jour de sa vie pour ne pas se sentir mourir !

 

Je quitte donc le visage de l’abbatiale à regret et l’embrasse du regard. On ne s’éloigne pas de la beauté sans un déchirement.

 

Sur la rue qui descend vers la route du voyage, je croise une grand-mère voûtée qui gravit la côte pavée, pliée en deux, la canne à la main ; je lui souris, son visage pomme reinette s’éclaire, les toits festonnés au-dessus de nous se souviennent de toutes les tables brodées qu’elle a dressées pour des fêtes de famille. Ce soir ira-t-elle écouter les chants dans l’abbatiale ou dormira-t-elle en songeant à d’autres temps, son cœur las mais heureux d’avoir vécu dans ce nid de silence ?

 

Quand la Bonté rencontre la Beauté, cela s’appelle, l’Amour.

 

Christian Bobin écrit qu’il ne peut être artificiel, l’ Amour, et malgré ses leurres et ses erreurs, la seule voie du « paradis ».

 

Sur la route, je suis de près un tracteur qui transporte une meule ronde

semblable à une miche de bon pain ; on la dirait sortie ( si ce n’était sa forme) d’un tableau de Van Gogh, sa paille me projette en été « couchée dans le foin, avec le soleil pour témoin. »

 

L’art ouvre tous les possibles de l’imaginaire.

 

La nature prend le relai, un bois dans la brume mérite une photo, c’est un autre tableau de légende qui m’accompagne avec un chemin creux bordé de pierres disparues sous la mousse et qui semble m’appeler à le suivre.

 

C’est le nouvel anet (selon l’expression à Julia Kristeva.)…

 « Je me voyage. »

 

Dans son livre, Bobin affirme sa rupture avec « le monde », préférant parler « des gens » et de leurs cheminements.

 

Il dit : « La vision de la bonté nous tirera d’affaire »

 

Ce soir j’ai besoin de le croire.

 

Chaque chapitre de « LA NUIT DU CŒUR » se clôt sur une note juste, indiscutable ; un chef d’orchestre semble faire le geste final, suspendu, un  temps d’arrêt devant la beauté et la vérité. Le silence qui suit est le miracle de la création.

 

Ainsi : « Fou est celui pour qui rien n’arrive que du passé. Saint est celui pour qui tout est éternellement neuf. »

 

La nuit de la St Sylvestre commence, je laisse vivre sa lumière sur les vitraux de mon intime abbatiale.

 

Ce premier janvier 2019 chez moi, je le vœux ( !) feu de bois et jardin ensommeillé. Un chat vient de visiter les carpes koï qui rêvent, comme moi, de Kyoto.

 

Je regrette un peu de n’être pas restée à Conques pour la nuit de passage, je serais allée partager des agapes avec les moines si joyeux. Je les ai vus, envolée blanche devant l’abbatiale, et j’ai retenu mon appareil photos préférant l’image spirituelle qui vit en moi simplement en souvenir des moineaux autour de St François.

 

Christian Bobin dit être allé à Conques presque malgré lui, il y a découvert une vraie joie, offrande de l’abbatiale ; sa grande réussite ne serait-elle pas qu’il m’a donné le désir de Conques et d’écrire en le lisant et en ouvrant mes yeux ; cela s’est fait dans mon esprit et par mon corps comme malgré moi, pourtant je ne suis en rien dans l’imitation : désir mimétique dirait Robert Misrahi mais c’est plus profond, une transmission, fil rouge spirituel.

Seules la lecture et l’écriture peuvent générer ce phénomène, à l’oral cela n’intéresserait peut-être personne comme n’intéresserait personne la confession de Bobin disant qu’il ne s’était pas senti à la hauteur de l’attente d’un moine lui demandant discrètement de dédicacer son livre.

 

« Le moi est haïssable. »

 

Je ne suis pas restée à Conques, j’ai voulu être raisonnable. C’est idiot.

Heureusement l’empreinte est indélébile.

 

Sur la route vers Bordeaux, j’ai fait des emplettes à Sarlat avec une pensée pour La Boétie devant sa belle demeure. Du XIème siècle au XVIème siècle, le temps de quelques virages et toujours le triomphe de la pierre. C’est le mystère de la beauté.

 

La force des images, Bobin a l’art de la révéler dans l’écriture : « A Tours, les religieuses avaient mis au milieu de la table un gros bouquet de roses du jardin. Une explosion nucléaire de bonté. »

Je n’oublierai pas ce bouquet que je n’ai pas vu, sans doute parce que je l’ai vécu. Ces mots révèlent l’âme tue. L’écrivain est un révélateur sensible qui fait mouche !

 

Pourquoi ai-je choisi cette année, ce - non choix de passer la nuit de la St Sylvestre seule ?

- Ce n’était pas mon genre, comme on dit…

J’ai privilégié la famille parsemée, allant jusqu’à Vallauris et visitant des amis dans le village de mon enfance près de Sète, j’ai rencontré les couleurs et la poésie de Chagall à Aix : j’en suis encore énamourée, elles se marient, je ne sais comment, avec la robe gris-blanc-bleu-argent-or…des vitraux de Conques.

Impossible de dire ma préférence, le tout étant Yin-Yang, inséparables.

Je suis aussi entrée dans l’antre de Picasso à Vallauris où je me suis sentie chez moi, comme si l’argile pétrie, malaxée par les potiers m’avaient donné forme et sens.

J’ai été éclaboussée de levers de soleil sur la Méditerranée, je les ai cueillis au réveil comme une promesse savoureuse pour toute la journée.

 

Riche de tant de beauté et de bonté offerte par mes hôtes, j’ai vécu en suivant la solitude d’une nuit comme le vide médian cher à François Cheng, où des notes fraîches se sont posées, à minuit, avec de doux voeux, pépites dans la mine de ma vie.

 

Le champagne pétille encore aujourd’hui dans mon cœur prêt à vivre sans regret le temps présent.

 

On ne peut revivre cela deux fois. C’est donc une expérience de l’âme qui appelle mon coeur à pouvoir célébrer un amour avec autant de présence. Seul JF m’a manqué mais son âme a rejoint les beaux nuages-vitraux de Bobin aux couleurs de son amour à lui.

Peut-être au fond, est-ce parce qu’on ne peut recréer le merveilleux de ce chemin qu’on ne vient qu’une fois à Conques, de peur de ne pas le revivre et délivré d’un doute.

Mais si on y revient ce sera toujours une première fois, l’abbatiale c’est à dire le Temps, a plus d’un tour à nous jouer pour nous faire retrouver l’éternité.

 

A la page 172, Christian Bobin oppose Conques « la petite à tête dure » à Bordeaux « ces bâtisses du dix huitième siècle qui vous regardent passer du haut de leur fortune »!

J’en suis toute intriguée sans étonnement cependant, tant j’ai eu du mal à me faire à un Bordeaux qui a fini par me conquérir par ailleurs, parce qu’il ne se donne pas d’emblée justement et pousse à l’évasion créative du côté de Conques, de Malagar ou de la tour d’un Montaigne qui écrivit : « Misérable à mon gré qui n’a chez soi où être à soi »

Dans la simplicité de l’élan sincère, j’y ai fait mon nid à ma façon pour mieux m’envoler avec un livre et lui donner de ses nouvelles en lui donnant des miennes !

Je ne sais comment je me suis dit que je ne lirai le livre « LA NUIT DU CŒUR » que devant l’abbatiale, sans doute un Ange a-t-il guidé mes pas en me parlant de poésie, de lumière, de bonté et de beauté ; Christian Bobin écrit : « Je sais, à la première jetée des yeux qui peut me tuer et qui me ravir »

De l’Ange que j’ai suivi, je ne sais toujours rien, c’est curieux tout de même, je lui ai fait confiance, lui devait savoir pour moi !

 

Le livre lu, j’entre en 2019, près d’un feu de bois qui se fait joie, devant le jardin qui attend son heure pour exploser de bourgeons : ce n’est pas la morte saison, c’est celle de la sève qui couve sous la cendre, celle des braises qui animent mon cœur en écoutant le souffle discret de l’an tout neuf !

 

Anny C.

1er /1/2019 

 

"J'ai lu votre texte avec un vrai plaisir"

Lettre reçue avec joie de Christian Bobin le 25/01/2019

 

LA BELLE ROUTE

L’autre matin, la route qui me conduisit à Lectoure fut un enchantement.

Très tôt, je partis dans le vrai froid de janvier, immédiatement saisie par l’eros du jour. Mon corps se mit à pétiller comme du champagne, faisant fi de tous les âges. Dans la voiture, le chaud monta jusqu’à mes joues et la radio devint inutile. Je l’éteignis pour écouter le silence de l’aube, et, par le souvenir, me lover au creux de l’épaule de l’amour de mes 20 ans dans l’autobus qui nous conduisait à Toulouse.C’était doux et délicieux comme un chœur d’anges.

Le paysage avait changé, mais pas la sensation qui me revint comme un bon vin chaud épicé. Je le bus jusqu’à plus soif, puis fus transportée par la nature qui défilait comme un film éternel. Il n’avait pas neigé, c’était plus subtil et le givre plein d’imagination rendait croustillants les arbres dénudés, habillés de blancs bleus sur la scène d’un Crazy Horse naturel très inventif !

En pleine campagne, des images me saisirent comme des Rothko : à plats de jeune blé en herbe,( plus vert ça n’existe pas), surlignés de lignes de terre marron fauve mourant au pied de feux de bois outre noir.

Le soleil, à cette heure matinale, gardait des airs de lune pleine tant il était argenté, et son reflet dans les lacs des propriétés agricoles, doublait l’ambivalence de l’astre, laissant à la nuit ses rayons de rêves. Côté nord, plus sombre étaient les fourrés, plus inquiétants, à fuir.

Le soir, au retour, les Rothko furent dominés par des ciels Zao Wu Ki, avec des fusées de rouges orangés balayant tout l’horizon , là , plus de clairs de lune mais un orgasme solaire incandescent à mourir de plaisir !

 

De cette belle route, je garde, invisible, à mon cou, une écharpe précieuse en cachemire et soie.

 

Anny C.

IL A SUFFI...

Il a suffi...


J’étreignis pour si peu de temps la fine pointe de mon âme que je ne puis que tenter de l’écrire pour la sauver.

J’étais là à me dire que c’était difficile ce temps qui passe, ces amis devenus, ces amours vagues à l'âme, l’enfance en allée, la mort , je me disais cela dans une nostalgie désinvolte, sans intérêt, nourrie de sanglots des violons de l’automne colorés de leurres éclatés, d’élans maquillés, de vérités niées, de cris étouffés.

Ce n’était pas très agréable de me dire cela et puis il a suffi de presque rien, de lire François Cheng pour que bascule l’angoisse, que la lumière fuse dans tout le corps comme une coupe de champagne, et que la joie soit là comme elle a toujours été,

vraie, imposante, indémodable, évidente, vivante, vivace, totalement là, ici et maintenant, libre au delà de tout commentaire, dans un frisson qui n’a pas de nom mais une telle musique !

 

 Anny C.

L’ELIXIR DE L'ETE

 

Quelque chose dans l’air change en ce moment qui quitte le plein été, entrant dans la lumière douce de septembre : ce mouvement léger et régulier, nous entraine vers un autre temps de l’année et nous plonge dans un esprit différent.

Le sentez-vous ?

On ne peut pas aller à contre temps.

Avec nos pépites estivales dans la mémoire comme les enfants reviennent de vacances avec des coquillages cueillis sur la plage, on est encore un pied dans l’eau mais l’autre touchant l’asphalte.

Il n’y a pas que des inconvénients à rentrer dans le monde, à rencontrer le jour qui diminue, à détruire ses châteaux de sable.

Place nette est faite pour une autre excursion de vie, pour d’autres activités, pour d’autres réalisations.

On retrouve, on rencontre, on fait le point avant d’escalader la côte qui se trouve devant nous et que nous suivrons pas à pas, inventifs, créatifs, aiguisés comme  mines de crayon d’arche.

Certes, nous ferons encore des escapades de ci de là, nous nous absenterons parfois  pour en profiter jusqu’au bout de cette lumière vive mais rien n’empêchera cette lumière même de changer, de passer de la couleur à la nuance et de vêtir d’autres soies.

Nous pouvons  changer d’horizons et aller vers d’autres cieux pour garder l’illusion de l’été mythique éternel mais, si nous nous coulons humblement dans nos climats, nous ressentirons les bienfaits des mutations car tout est mutation sauf le changement.

On ne recommence rien quoiqu’on dise, on va en devenir, épousant les différentes heures de nos vies comme le bon nageur qui se pâme dans l’onde dit le poète.

Dansons  avec l'arrière saison, l’élixir de l’été.

 

Anny C.

DU TRAIN

Du train je m’écris une lettre de foi.

 

J’aime regarder les ciels sur les tableaux de maîtres. Ils sont tous différents, plus ou moins ratés ; celui que je regarde depuis mon compartiment est changeant et donc beau. Tantôt lumineux, il rend mon esprit optimiste, tantôt mât, il mâtifie mon esprit.

Certaines personnes préfèrent les photos brillantes. Je n’ai jamais su choisir. Souvent j’ai choisi le brillant, parfois le mat pour l’esthétique comme on dit. La réalité est entre les deux. Tout est toujours entre les deux. Le brillant n’est pas la lumière.C’est bien là le problème des peintres. Sur les écrans d’ordinateur, les ciels sont plus vrais, mais plus vrai que nature, ce n’est pas vrai.

C’est comme pour les verts. La vérité d’un vert est impossible à atteindre. Il y faut une autre pointe d’un autre vert pour s’en rapprocher. On pourrait parler d’outre vert comme Soulages parle d’outre noir. Affaire de lumière. Toujours.

Dans les blancs de Malevitch, ton sur ton, c’est comme du bleu. C’est comme les ciels insaisissables et présents.

 

Anny C.

 

DES CHEMINS ETOILES

 

Dormir tout mon saoul et entendre la pluie chatouiller les gargouilles, aller déposer délicatement les hortensias blancs du jardin délaissé sur la tombe sacrée, me laisser laver par la pluie de juin qui lave de tous les hivers, passer à la Maison de la presse sans trop savoir pourquoi et,  sur une étagère, voir un de mes recueils de poésie attendre patiemment un lecteur, regarder d’autres livres bayer aux corneilles sur des étals et feuilleter l’un d’eux écrit par une amie chère. Laisser alors les mots effleurer mon cœur et m’en aller, l’enfance dans l’âme, pour prendre la route qui prend.

 

Il y a des chemins étoilés qui consolent et vous plongent dans la vie comme un chant d’oiseau printanier, absolu.

Me laisser surprendre : ça dégouline de roses jusqu’au diable Vauvert, c’est le temps des magnolias en fleurs et des coquelicots dans les fossés, des roses trémières qui n’arrêtent pas de grimper jusqu’aux cieux, des hortensias qui se roulent en boules , des tilleuls allumés de myriades de papillons vert tendre. Dans des calices d’arômes, le jasmin rivalise de parfums, des traits de cyprès fendent l’air au pied de clochers en dentelles, les vignes chantent  Bacchus , c’est fulgurant, je ne veux pas que le temps passe : j’assiste au mariage du sacré et du profane sous la caresse du vent.

Les verts éclatent de joie.

J’arrive en pays de Duras, sous un ciel d’argent dominical. 

Au bar où je fais une pause, des Anglais, rien que des Anglais… et de la Leffe qui coule de toutes les couleurs !

Etrange impression d’ailleurs et de nulle part, sentiment de laisser aller exotique ; des parasols impudiques sont couchés les uns sur les autres dans un coin. Ne pas m'éterniser,  repartir, marcher jusqu’à la rose orangée de Marguerite  et respirer son parfum dans l’angle des rues où elle se niche puis, enivrée, quitter la ville et le château, plonger de nouveau dans l’opulente nature.

Alors, ne plus rien détailler, me laisser couler par monts et par vaux, jusqu’à bon port.

A Verdelais, le soleil est revenu. La basilique attire les promeneurs, son ventre est matriciel. Une atmosphère  précieuse et baroque retient les corps et fait ployer les âmes.Le murmure  humain des prières délivre les nuages qui passent.

Un bleu marial s’installe.

Non loin, dort Toulouse Lautrec. Le musée d’Art sacré ne contient aucune de ses œuvres. Et pourtant...

La rue principale de Verdelais fait une haie d’honneur au pèlerin et, même si Rimbaud n’est jamais passé par elle, les tilleuls sentent bons dans les bons soirs de juin.

Mauriac, en voisin, a dû les sentir et respirer toute leur poésie.

Un seul lieu peut ainsi contenir tous les secrets du sacré ! A Vézelay,( et je remarque que  les noms de ces deux villages se ressemblent), j’ai eu cette même impression.

Maintenant, j’entre dans la basilique: immédiatement éprise!

C’est au coeur, une aiguille d’acupuncture, une émotion si forte que je ne peux demeurer  trop longtemps, comme si, à l’inverse du bar visité précédemment, j’allais ne plus pouvoir repartir vers le profane.

Il y a dans ce lieu, un homme que je reconnais, le gardien ; il veille sur la librairie et parle : il parle de sa guérison d’une leucémie et du sentiment qu’il éprouve chaque matin en ouvrant la lourde porte, clés précieuses en mains.

« Et vous ? » me demande-t-il.

-  Je ne suis pas malade, mais j’aime entrer ici, moi aussi » lui dis-je.

 C’est tout.

La route  parcourue au cours de ce dimanche de juin, m’enveloppe comme le ferait une écharpe de vent .

 

 

Anny C.

UN SACRE DIMANCHE

Question de temps
 
 
Quel nom le Gers prend-il pour moi en ce samedi rayonnant de lumière chez les amis Jeanine et Robert ?
 
Des soleils  plongent dans les champs de blé, des verts moussent dans les bois de trousse chemise, la douceur des lignes galbe les coteaux ; plus loin, bien plus loin chantent  les Pyrénées…
Se canto, que canto…canto pas per jou…
 
Pour qui le Gers chante-t-il aujourd’hui ?
 
D’ici, ma vue embrasse des morceaux choisis de champs cultivés, sortes d’abstractions picturales.
Un clocher, un peu à droite, arrête mon regard, sa flèche est taillée au canif comme la pointe d’un crayon dont la lame palette couperait court à l’usure du temps. Autour de lui, se blottissent des croquis de maisons aux humbles toits de tuiles roses.
Un chant d’oiseau me réjouit, le vent fait danser les tilleuls, le point de vue du jour ne révèle aucune ombre.
 
Est-ce bien vrai tout cela ?
 
Mon Gers a ses strates, ses feuilletés sucrés salés, ses pleins et ses déliés, ses vicissitudes du moi. Il est mon écrin de rêves et représente mes désirs d’ailleurs.
 
Voici le Gers de mon enfance qui s’élève d’une rue de la ville, là-bas, au creux de la vague verte. Il monte d’une rue de Fleurance, ma ville natale avec son clocher bien taillé…
C’est celui d’une maison vibrante comme une ruche : celui de la distillerie de mon père où coule l’eau de vie d’armagnac, pur nectar du terroir.
Ma part des anges distille aujourd’hui des mots et porte ses flacons d’ivresse dans les ateliers d’écriture étiquetés TALENTS.
Ô qui dira les méandres du sang  d’encre ?
Cette entreprise familiale piquait en Juillet les prunes reine Claude du Lot et Garonne  pour les plonger ensuite dans des bacs de liqueur d’armagnac où, en cachette de mes parents, je plongeais mon bras jusqu’au coude, cueillant une prune par sa petite queue de bois brun pour la porter bien vite, subrepticement, à mes lèvres gourmandes au risque d’en être un peu troublée. Mon bras gardait alors la sensation collante des transgressions.  
C’était aussi le temps des grandes vacances  qui m’invitait à sortir de l’allée de marronniers, pour m’envoler, à bicyclette, avec les copains et les copines, sur les routes du département.
C’était à Montestruc, je m’en souviens, que nous allions ouvrir nos transistors sur l’herbe : ils chantaient à tue tête L’eau vive que Guy Beart fredonne aujourd’hui en tremblant un peu, et commentaient le Tour de France mythique…
Nous nous baignions dans la rivière un peu trop beige, un peu fade, me semble-t-il, et nous nous séchions aux rayons des éclats de rire de nos corps fermes comme la terre gasconne.
Dans les champs, alors, poussaient des millions de tulipes rouges ou jaunes, sauvages et fières, que nous cueillions, disparaissant derrière les brassées qui nous écrasaient de joie de pouvoir les offrir au retour à nos familles. Elles devenaient d’énormes bouquets bringuebalants, aux formes insolites et imprévisibles, presque comiques.
 
Mais où sont les tulipes d’antan ?
 
Ma rue des Alliés avait pour moi comme Polichinelle, trois maisons avec poutres et chevrons parce que c’étaient celles de mes grandes amies, de celles avec qui je refaisais le monde, avec qui je parlais de garçons et de littérature et avec qui je concoctais des plans.
Des autres maisons, je n’en avais cure !
 
Aller sur la place de Fleurance, y « monter » plus exactement, relevait de l’aventure : celle qui nous faisait tourner autour, les jours de marché et les jours de fêtes, en riant aux éclats dans nos jupons amidonnés, puis dans nos jupes très courtes, nos mini –jupes d’alors qui n’ont rien à envier à celles que je vois aujourd’hui à tous les coins de rues.
Nous montions aussi pour  acheter des gâteaux chez Lacoste et si vous n’en avez jamais mangé de ces gâteaux, vous ne saurez jamais le goût inénarrable des barquettes au chocolat avec leur pompon jaune. C’est ainsi, vous ne pourrez jamais être complice de cet air du temps et de la mémoire de ces choses…
Mais je sais, vous avez vos gâteaux à vous, les meilleurs, bien sûr.

Est-ce cela être né quelque part ?
 
Je suis  partie de ce Gers, parce qu’il y avait ailleurs des puits de culture.
A Toulouse à l’université, jusqu’à contester les codes parentaux et envoyer au diable Vauvert tous les verts ! J’ai souhaité allumer d’autres feux d’espérance, de liberté et de partages. Ce fut une époque bouillonnante, complètement trahie, une clairière de gaité sans mur ni contrainte.
Sont-ce maintenant les lendemains qui déchantent ?
L’argent jeté aux flammes alors, ressuscite de ses cendres et on le voit partout trôner,  bien installé dans ses pouvoirs.
 
Fallait-il que jeunesse 1968 se passât  en ces temps là ?
 
Longtemps je me suis couchée ailleurs en pensant à ce Gers : depuis l’Ouest je le voyais rassurant, nourricier, bienveillant, patient.
Solide sur mes archaïsmes comme sur des échasses, j’ai  déployé mes ailes en Ariège, dans les Pyrénées, en Vendée, dans le  Marais Poitevin, dans l’Hérault, à Bordeaux…Partout j’ai bu du bon vin pour trouver la vérité des lieux…Partout j’ai senti le relatif et le sacré.
 
Maintenant quand je reviens, parce que je reviens n’est-ce pas, un jour, deux jours, trois petits jours et puis s’en vont, tout change à une vitesse vertigineuse : la campagne a perdu ses haies et ses bonnes vaches, les champs s’étendent jusqu’au ciel, la beauté est paisible et accueillante s’installant sur les genoux des résidents, pleine de promesses.
 
La trouveront-ils un jour amère comme le poète ?
Objets de convoitise, les maisons de campagne se sont fait des liftings, les villes dansent la salsa ou jouent du jazz et l’on court de partout aux courses taurines…Le ciel de Fleurance n’a plus de secret pour les astronomes…
 
Quel est donc le secret qui me reste ?
 
Les alambics ont essuyé leur dernière goutte, la maison de famille entrouvre de moins en moins ses volets. Ses oisillons sont partis essaimer dans d’autres quartiers, villes, pays ou continents…
Quand je viens lui dire bonjour, elle prend un drôle d’air, me fait la grimace, mais je ne supporte pas ses reproches,  ne discute pas, lui fais un brin de toilette, taille les cheveux de ses haies et lui demande narquoise quels sont nos vrais héritages ?
Elle n’insiste pas, bonne mère, et me voit repartir rassurée vers mon destin, sachant qu’un jour je la quitterai vraiment, sur de bonnes bases.
J’ai perdu récemment ma dernière ancêtre mais je sens que la force de tous mes aïeux est là, bien ancrée, en moi, bien au-delà d’une maison, d’une rue, d’une ville, d’un département ; au delà de ses frontières, le Gers toujours revisité, m’offre des cadeaux inattendus, de nouvelles rencontres, de nouveaux partages. Avec du vieux, il fait du neuf, il prend finalement le nom d’une question, celle des détours, des retours,  des détachements, des vraies relations vivantes, de la sublimation, de l’écriture, il rejoint le sens de ma vie  comme un écheveau à dérouler, à démêler, à tisser, à vider, tel un rouleau de soie.
 
Depuis la terrasse de Jeannine et Robert en ce 2 Juillet 2011, à Castelnau D’Arbieu, avec les amis en écriture, des amis de Talents, le Gers prend un air de port de plaisance ou de bateau à quai sur mer d’huile ; il ressemble à un parachute qui se poserait lentement pour voiler les duretés du monde, créer une bulle de civilisation où les hommes auraient enfin trouvé leur la. Il devient un tableau de maître, celui dont je reste le disciple fidèle et libre.
 
Est-ce la naissance du monde ?

Anny Carrère
 
 

QUESTION DE TEMPS

 

Jeudi 30 Octobre 2014  chez moi

 

 

L’automne s’installe doucement. Le soleil s’incruste sur les pavés des villes.

Les couleurs feux pâlissent tant l’été tarde à mourir.

On se réjouit de cette douceur comme si la météo  consolait de la crise de civilisation.

Rimbaud, dans son « Adieu », a crié sa lucide présence au monde.Si l’hiver tarde à venir, il viendra cependant et nous rechercherons le confort pour nos corps mais que ferons-nous de nos âmes ?

Garder la fougue printanière au milieu des frimas, la foi parmi les doutes, boire l’eau pure des sources dénichées au pied des hautes herbes, fendre les eaux spectrales d’une rame aiguisée, avancer, la joie chevillée au corps, tel un faisceau lumineux, oui voici le chemin qui me précède et me suit.

 

Le point d’interrogation de mon âme

Dans le ciel froid griffé de lune

Que cherche-t-il ?

Une spirale de brume fume des sentiers

Oh la cueillir!

Elle file entre les lignes

Sa danse m’emporte

Mains ouvertes au présent.

 

C’est la saison des intermittences de l’âme.

Les odeurs de sous bois, les champignons rubiconds, les camaïeux de roux - du blond, à la couleur cannelle - nourrissent nos papilles et font chanter nos tables qui se couvrent de nappes blanches et de chandelles frémissantes comme des faons dans les forêts : la vie donne son dernier coup de reins dans une impudique extase, avant que braises puis cendres elle ne se couche sur les tombes.

La mort fleurit alors sur un riche terreau nourricier.

 

 

La fête de tous les saints

 

Tiédeur lasse

Ralenti engourdi

Mauvais rêve

Temps qui s’englue à force de rappels

Coque vide

Toussaint !

 

Chrysanthèmes feux follets

Mains qui caressent les marbres

Pas sur le gravillon des allées

Une femme passe avec son enfant

Des fleurs les embrassent

Où vont-ils donc ?

 

La Toussaint adoucit la mort

On se sent presque bien avec elle

Les visages se croisent sans rire

L’ironie baisse la garde

Reste une conscience de vivants

 

Peu s’attardent il est vrai

Sauf les vieux

Ceux qui déposent des brins de bruyère

Qui se souviennent

Et qui laissent à penser

Au soir qui tombe.

 

 

Une musique mélancolique monte des fourrés où se terre le gibier, une sourde symphonie embrase les champs tout retournés sous des ciels raphaéliques, évanescents et pâles.

Rien ne gronde encore.

Pourtant les villes ont changé de rythme et les passants se croisent pressés comme s’ils savaient tous qu’à l’heure dite, il faudrait être arrivé quelque part. Mais où ? Chacun garde sa destination comme un trésor secret.

 

Une épure ?

- Vois la révérence de la branche alanguie

Un halo ?

- C’est la brume qui flotte dans l’air

Un silence ?

- Celui du chat persan sur le tapis

Un parfum ?

- Sens le bois qui brûle le passé

- Un mot ?

 

V

E

R

T

C

A

L

 

Anny C.

 

 

Je me souviens du village de vacances de mon enfance

 

 

 

Si je ferme les yeux et que je me souvienne, je me souviens du Pouget de mon enfance qui bat comme un coeur au rythme du chant des cigales.

Je me souviens en vrac du virage en arrivant avec le panneau qui annonçait la joie de vivre LE POUGET comme on dirait LE PARADIS, et des mûres qui murissaient dans  les haies .

Je me souviens de la rue de l'Estang qui montait vers le temple de mes vacances au numéro 17 exactement !

Je me souviens de la porte non du garage mais du magasin qui s'ouvrait comme un éventail par les chaleurs cuisantes et de ma petite tante Jeanne qui m'accueillait en riant et en sautillant.

Je me souviens du cheval de mon oncle et du chemin que nous prenions pour aller à la Rivière cahin caha en tournant la mécanique tantôt mon frère tantôt moi.

Je me souviens sur ce chemin des hommes qui travaillaient dans les vignes et de leurs torses nus- chemises d'hommes heureux- et de leurs SALUT JOSEPH sans arrière pensée.

Je me souviens du goûter et de la gourde, des cigales collées au murier contre le mas et de la couleur ocre de la terre, des grappes de chasselas dodues et des coquilles d'huitres fossilisées par terre, près de coquilles vides d'escargots et des fifres que l'on jouait avec les roseaux.

Je me souviens du pot au lait qui bringuebalait sur le guidon de mon vélo, là haut dans une ruelle tortueuse vers la marchande et des bosses qui lui donnaient un air de brocante avant l'heure.

Je me souviens de la poignée de la fontaine qu'on tournait et de l'eau qui coulait dans ma bouche sur la place devant la maison de l'électricien qui faisait l'angle et le fait encore aujourd'hui comme sur une scène d'opérette.

Je me souviens du boulanger en contre bas et de l'odeur rousse de son pain.

De l'odeur aussi que l'on sentait en entrant chez Maragou et des carreaux rouges et blancs de l'office.

Je me souviens du rideau rayé qui annonçait la boucherie et de tous les rideaux rayés qui dansaient sur les portes comme rideaux de théâtre, des escaliers qu'on découvrait quand on les poussait en entrant et de la clochette qui tintinabulait comme un coucou pour annoncer le visiteur.

Je me souviens des siestes obligatoires avec  des livres à l'eau de rose que j'avais dégottés dans le grenier parfaitement organisé de souvenirs d'antan.

Je me souviens de l'odeur du foin coupé se mêlant à celle du thym quand je montais dans ce grenier.

Je me souviens des voix qui criaient aux ménagères" la sèbe de Lézignan" ou" le marchand de chaussures est arrivé sous les halles" et du vol d'alouettes de toutes les ménagères qui sortaient de leurs maisons avec leurs paniers à la main. 

Je me souviens du haut parleur qui annonçait les films pour les soirées à la Maison du peuple et de SI TOUS LES GARS DU MONDE . Je me souviens des applaudissements dans la salle quand sur l'écran il y avait un baiser.

Je me souviens de la belle route Neuve dont nous, les 44 et les 43, nous usions les bancs de ciment les soirs de pleine lune et des baisers que personne n'applaudissait.

Je me souviens qu'en Birmanie j'ai ressenti le même petit vent que sur la route neuve...

Je me souviens de cette atmosphère atmosphère inénarrable qui couvrait alors nos bras bronzés et jeunes.

Je me souviens des boums, des Tépaz et des terrasses des amis, des tangos et des passos.

Je me souviens des bruits du village, de la scansion des pas des chevaux lourds et forts.

Je me souviens du temps des chasselas, des élastiques que l'on tirait comme des arbalètes et de leurs croisements savants, du bruit du papier sulfurisé qui fermait les cageots et de celui des charrettes qui les transportaient; je me souviens des camions des expéditeurs venus de grandes villes et des palabres sur les prix dans la rue.

Je me souviens des petits cliquetis des ciseaux qui taillaient le bois des raisins et du goût des chasselas bien meilleur qu'à Moissac !

Je me souviens du vin sucré qui me donnait des forces et que ma tante était fière si je prenais du poids.

Je me souviens des messes, des vêpres et des escapades au Gros d'Agde, de la couleur du sable sec et mouillé de la plage.

Je me souviens des fêtes dans les villages alentours et que nous dansions, nous dansions, et du tour de France à la radio et de Louison Bobet. 

Je me souviens de tout...

Du rire de mes amies, de celui éclatant de Jacquot, en cascade de Nanou , franc de Jeannette, et que ça crée des liens.

Je me souviens que je n'oublie pas la salade du soir sur la terrasse et de l'odeur des sarments véritables serments gustatifs pour la vie entière. Aussi, aujourd'hui à midi, la côte de boeuf chez Babeth et Jacky a été ma madeleine de Proust.

Je me souviens de Marc un peu ivre en passant par le Gers et qu'il me raconte souvent son baptême en armagnac au cas où je ne m'en souviendrais pas...

Je me souviens de la vache qui rit et de la pâte de coing, que le vin est la plus saine des boissons et que j'aimais aller à St Guilhem et à Sète et que ça dure.

 

Je me souviens

Des oliviers en dentelles de feuilles

Et du lézard qui filait entre les pierres

 

Je me souviens

De la lumière entre les persiennes

Et de la pluie d'été

 

Je me souviens

Comme si c'était hier, comme si c'était toujours

De ces touches lointaines qui me rappellent à elles

Et je ne sais au fond si j'en ris ou si j'en pleure.

 

Et vous?

Vous en souvenez -vous?

 

ANNY

LE POUGET

13 AOUT 2014

CHEZ JACKY

à la manière de Pérec

 

 

LA PIERRE SAUVEE

 

La fumée du bâton d’encens délivre près de moi une odeur suave, dessinant des spirales qui dansent sur les blés du Gers. 

Mes ailleurs se confondent, je suis ici près des pierres tombales de mes ancêtres et cette pierre blanche et crayeuse posée là sur la table, sous mes yeux, m’appelle à entrer en relation avec le temps qui passe.

Je la regarde dans sa nudité, vieille main détachée de son bras, sculpture naturelle tombée d’une paroi qui me demande de l’habiller de mots.

 

-D’ où viens tu ? Es tu vestige d’un château, dernière trace d’un pauvre mur ?

As tu appartenu à un prince, à un poète, à un sage ? 

Tes veines creusent ta matière tendre, tu es du rocher la mémoire et tu parles à mon cœur:

- habille moi, dis tu, de ton regard aimant, pose sur moi une caresse, réchauffe moi, j’ai perdu ma structure et les pépites de lumière qui dansaient sur moi, oui les vents ont parcheminé ma peau,

- habille moi de tes mots dentelle, soie et velours, redonne moi mon chant et l’enfance de l’art, les notes des voix chères dans les hautes herbes et de celles qui roulent comme les billes d’agate du chant des oiseaux,

- parle moi sans détour de tes guerres lasses et de tes rêves les plus fous, confie moi le chemin parcouru, tes faux pas et tes chutes. A la borne du temps, je garderai tes souvenirs, j’en colorerai la trame, en sublimerai le sens. Avant que poussière ne sois, donne moi ta plume mon amie, toi qui m’as ramassée parmi les ruines et les marguerites et qui m’as prise délicatement comme un trophée.

 

- Oui, pierre don de dieu, je te prends à pleine main, ton visage inscrit en creux contre ma ligne de vie et je regarde ta moire, souvenir d’un trouble vert et d’un gris piqué d'un blanc cassé de rose des sables. Rien en toi pourtant ne rappelle les déserts, tu as quitté le lit de tes rivières pour un ancien puits où se mirent les hirondelles et moi,  Petit Poucet consciencieux je sème sur ma route , pour toi, ces mots petits cailloux blancs ...

 

 

Toi

Ma pierre sauvée des eaux

Qui descends des montagnes

Angles érodés aux larmes du torrent

Veinée d’encres de mousses

Echouée au bord d’un lac de plomb

Qui peint des Braque   

Narcisses minéraux médusés

Pierre Mémoire des algues noires

Et des limons blêmes des boues

Tu tiens la flamme tout contre

Et peux jaillir d’étincelles

Toi

Ma pierre qui parles des anciens 

Et des morts

Les sais vivants d’écume

Fiers

En marche toujours

Dans la chaleur 

A fendre l’âme témoin des ères

Méconnues

Continuum subtil du geste

Fragile

Qui te touche. 

 

Maintenant, le bâton d’encens s'est consumé, un parfum d’Orient enchante la pièce où j’écris et pierre, feu et mots font une tresse en épi qui part danser, là-bas, dans les champs de blé.

 

Anny C.

18 Juin 2014

 

ELLE CHANTE EN MOI...

 

 

Madame,

 

Ca chante en moi.

Hop la...

Du plus loin qu’il m’en souvienne votre chant, Madame, me met dans un indicible trouble.

Je tente cependant aujourd’hui, de vous dire,  par delà le temps, l’enthousiasme de mes 20 ans à Toulouse avec André mon fiancé et Michel mon ami d’enfance mort aujourd’hui du Sida, et je  vous imagine souriante quand  j’évoque, pour vous, combien nous étions assoiffés de mots, de musique, de poésie et désireux des méandres de votre voix qui nous faisaient un lit d’amour, et des jours et des nuits d’amour...

Comme une plume, ce jour là, vous êtes arrivée sur la scène, dans votre maturité et, nous, jeunes encore, sensibles et pleins d’émotions  prémonitoires nous étions inconditionnels, absolus. ! Michel sautait sur son fauteuil, allait vous offrir une rose rouge à l’entracte, revenait en nous disant : « Elle m’a reconnu » 

Comme nous  étions heureux, avec vous cette nuit là !

Alors, pour ne pas nous séparer de cette émotion fondatrice,  nous vous avons emportée dans nos bagages éternellement.

A partir de ce jour là, il y eut pour moi ceux qui vous aiment et les autres.

Et... ça chante encore aujourd’hui en moi et ça pleure le temps passé, mais, comme par inadvertance, vous revenez, fantôme de l’opéra  en ce jour de pluie de mots.

Vous voici donc transfigurée, vertige parfait,  Vénus née dans l’onde d’un tableau de Soulages,  striant de lumière ses zones verticales.

Vous voilà Joconde ambiguë dans un Louvre céleste mais tellement plus vivante qu’elle, corps de ballet à vous  seule,  accent grave dans l’aigu, spirale de fourrure,  bas résille entre deux portes,  lèvres rougies dans la nuit,  sanglot long de l’automne, éclat d’un rire pirouette.

Maintenant, ce sont des images qui s’imposent à moi  dans un film étrange et pénétrant comme un rêve verlainien. Il y a des aigles noirs  sur les pavés de Nantes et la pluie qui bat la mesure de vos pas ; il y a des enfants juifs qui jouent comme des enfants, des morceaux de soleil, des aubes qui reviennent quand même, de la beauté partout où on ne l’attend plus, des appels, des retours, des départs encore des départs.

Est –ce la main de Dieu, est-ce la main du Diable  qui fait que vous restez en moi comme un refrain serti de roses de velours au jardin que voilà ?

Des phrases chantent toutes seules dans mon cœur comme un orgue de Barbarie, de Barbara dit votre ami Serge Lama, petits cailloux blancs qui dessinent le chemin quand j’ai peur.

J’avance.

Si, mi, la, ré, Si mi la ré, Si sol, do fa, Si, mi, la, ré...Oh ! Mon amie oh ma douce, recommencez pour moi votre petite cantate, soupir  de l’attente  du baiser du soir du narrateur dans la recherche du temps perdu car, Madame, que cherchiez vous, sinon ce temps perdu qui jamais ne revient ?

Conscience ouverte entre vivre et mourir, icône en majesté, je vous regarde avancer avec des offrandes d’espoirs et de présence pure dans les yeux.

Et si nous nous étions  retrouvées et qu’il ne soit pas trop tard dans votre île aux mimosas ? Qu’importe ce qu’on peut en dire, je tenais à vous le dire : ma plus belle histoire d’amour c’est vous aussi, Madame, quand vos mots font écho aux miens dans le partage, la communion de notre humaine condition de femmes sensibles, sensibles aussi à certains hommes.

Vous  savez bien  que je parle de ceux que vous attendiez, de ceux qui ne sont pas revenus de la salle des pas perdus ou de ceux que nous aimons toujours ou que nous aimons maintenant dans notre vague à l’âme, oiseaux de lune s’accrochant à la brume de nos regards fiers, chevaux d’écume qui galopent, galopent ...

Je crois en l’aurore, je crois  au chant rédempteur, au vôtre, au mien, et je vous tutoie  ce soir, Barbara, comme Prévert tutoie tous ceux qu’il aime, même s’il ne les connaît pas.

 

Hop la !

 

Anny Carrère

 

1er Février 2014-02-01 Gradignan

 

 

SUR LA ROUTE

J’ai ce matin fait un voyage de rêve sur la route Bordeaux Lectoure.

Le chaud dans le froid
Douce fourrure sur ma peau
Visions
Rouge le ciel rouge
Un oiseau sur la branche
Un nid abandonné
La terre ensanglantée
Accouchant du soleil
La beauté sous mes yeux
Emerveillés
Ephémère tableau
Qui s'estompe sous la brume
Me laissant dans l'émotion
Ravissante

J'aurais pu ainsi rouler très longtemps, ne ressentant aucune lassitude, mon corps vibrant dans l'harmonie du ciel et de la terre.
J'ai accroché l'estampe à mon esprit pour l'éternité; elle a rejoint d'autres tableaux de mon intime musée.

Puisse cette harmonie envahir toute ma vie et la vie tout entière.

Anny C.

 

 

UN DIMANCHE TOUR BOUCLE ...

 

 

Ma promenade en boucle de ce dimanche de mars enlace la place de Bazas comme, du regard,un spectateur embrasse une scène de théâtre.La pièce qui s’y joue a peu d’acteurs aujourd’hui; les gens vivent leur intimité dans les coulisses.

Je croise un pauvre homme qui me demande l’aumône: le décor est XVIIème mais l’homme est bien mon contemporain!

Autre temps mêmes mœurs ? 

Les rosiers anciens eux,beaux indifférents, enlacent les balcons comme des boas feuillus et languissants qui attendent patiemment que fleurissent les roses que je sais jaune paille ou très rouges et qui me font une envie folle quand elles s’ouvrent partout à la fois.

Sur l’un des balcons, trône une cocasse sculpture d’acier donquichottesque qui semble être là, chez elle, depuis toujours, aussi rouillée que les fers forgés du balustre.

Le décor est planté mais la comédie n'a pas lieu d'être car l’harmonie du lieu n’a rien de dérisoire et tient aux proportions architecturales de la place et à la  vénération que chaque façade, chaque pavé, semble vouer à la cathédrale. Elle, elle est assise sur son socle de pierres et ne cesse de faire la belle, souveraine.

Le jardin clos, à ses côtés, est printanier et pastel: on dirait une des  jeunes filles en fleurs de la littérature.

Une jeune femme plus mûre, photographie les gargouilles pendant que son compagnon petit prince, l’attend comme les rosiers des balcons attendent les roses et les arbres frissonnent sur le chemin de ronde où j’entends chanter des rossignols de contes de fées.

Je fais partie du tableau que je délaisse  un moment, entrant dans une brocante chic où un plateau chinois ancien me tente sans que je lui cède. C’est un lieu qui expose des objets rassurants et muets qui en ont vu d’autres…

A la table du restaurant où je me décide à entrer, une atmosphère familiale et bourgeoise dénie la crise qui secoue l’Europe. Des plats abondants et savoureux passent d’une table à l’autre : foie gras, magret sauce aux cèpes, café gourmand, vin de Bordeaux…

On y resterait éternellement.

Le maître des lieux est un pâtissier hors pair, spécialiste des meringues, créateur de celle en forme de coquille St Jacques. Fidèle à la tradition familiale, il n’a jamais, lui, quitté cette maison. Comment partir de chez lui sans en emporter une ? Il en est fier et je suis sensible à cette fierté qui le définit et qui me fait y revenir parfois en rentrant du Gers, tissant avec lui un lien familier provincial un peu désuet et méridional.

Je sors bien nourrie de cet établissement centenaire comme on se doit de l’être un vrai dimanche de printemps.

La route que je prends alors, hors les murs, fait escale dans une jardinerie où je m'entiche d'un camélia blanc et d'un mimosa en fleurs que je planterai en rentrant; à côté de mon camélia rose, le blanc sera en tendre compagnie et le mimosa mettra sa touche d'or vif au cœur de mon jardin. Cela manquait.

Ma voiture sent bon le printemps et les chants a capella de l’abbaye du Broussey mettent une note spirituelle à cette atmosphère florale sur les coteaux de l’Entre deux mers, dos de hérissons hérissés de piquets bruns qui protègent les grosses bâtisses ou châteaux que l'on ne voit jamais aussi bien en été. Leurs chais préparent le cru de l’année qui sommeille dans les barriques et les foudres en rêvant.

Le lasso de ce dimanche bouclé m’a reliée au terroir sur fond de complies meringuées qui enchantent ma plume.

 

Anny C.

JE VOUS LE DIS...

 

 L’homme est au piano désaccordé.

Enfant, j’y fis des gammes. Le professeur sévère désaccorda l’enfant.

Ce soir, un homme se joue du désaccord . Ses notes emplissent l’espace comme bulles légères. Il se joue aussi des principes. Sur ses genoux, il assied son enfant. La petite fille, alors, tente d’y mettre sa touche: l’homme rit et continue à déjouer les sons. Dans le faux pas, il trouve la note juste.

Je souris, accordée au joyeux concerto.

Dans la maison, chantent les «cavatines»( comment dire mieux que le Poète? )

Il n’est plus rien que cet instant.

Par la fenêtre , mon regard caresse une ombre blanche ; une jeune femme entre et, sur un meuble, dépose un cattleya .

Son homme joue ce qui lui passe par le coeur.

Dans la maison, dansent les accords, il y a comme un refrain qui ne s’éteint pas.

Le jardin est entré dans l’octave, un chant s’élève : le couple s’éprend de lui.

J'écoute avec l'enfant.

Le silence qui suit participe au mystère.

 

Anny C.

 

 

Anny 11.07.2013 13:34

Oui c'est cela merci à toi.

Nina 11.07.2013 10:43

quel silence musical ! des mystères en doubles croches et des accords raccordés... Magnifique ! encore... encore...

lachartre patricia 20.06.2013 19:20

en un mot : magnifique !

Anny 20.06.2013 19:27

Merci à vous

CATHY PERRONNET 13.03.2013 17:36

Tu as l'art de faire vivre ce que tu décris devant les yeux de tes lecteurs. Tu m'as donné envie de m'attarder à Bazas. Merci.

Commentaires

06.04 | 06:20

Emerger de notre vivier , aprés y avoir puiser toutes les émotions .
Ecrire , crypter ce vécu , cette traversée .....

10.10 | 11:28

Aimer ne se négocie pas - oh que non. L'amitié non plus. Amour Amitié ces deux piliers de la vie - Merci Annie de si bellement nous le rappeler.

25.01 | 06:56

MAGISTRAL, DEVOS

06.08 | 13:40

Bonjour Anne Marie,

Quel plaisir d'écouter Pascal Quignard, que je n'ai jamais réussi à lire, je vais essayer à nouveau avec "l'Homme au trois lettres".

marc